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Reprise de (haute) volée

Reprise de (haute) volée

Reprise de (haute) volée

Pas facile d’exceller dans le domaine des reprises. C’est même jouer à un jeu dangereux qui peut conduire à l’humiliation sans retour. D'ailleurs la télévision, à travers ses émissions de télécrochets, témoignent chaque mois de l'étendu des dégâts. Et pourtant, les miracles existent et parviennent à créer l’étincelle. Ainsi, certaines réinterprétations subliment l’original. En voici, sans doute, l'un des meilleurs exemples.

Dans ce petit concours de l’amour du risque, on peut citer en vrac Joe Cocker clamant avec force le tranquille With a Little Help For My Friends des Beatles, Eric Clapton transformant l’hymne Reggae, I Shot The Sheriff signé Bob Marley en mélopée "Blues" ou encore Santana s’attaquant au Black Magic Woman de Fleetwood Mac. Le tout évidemment avec réussite et panache. Passons sur les échecs notables de l’industrie du disque dans ce domaine, et tournons-nous vers un Everest de la reprise, un building de la relecture, un océan d'émotion dont on ne pourrait jamais imaginer le caractère « Canada Dry ». Une mission totalement impossible, me direz-vous, lorsqu’on s’attaque à un mythe collectif et mondial comme les Beatles. D’autant plus que l’artiste qui s’y colle fait ses débuts. Et pourtant, et pourtant…

Cri du coeur

Il faut dire qu’à la base de la recette, la jeune femme possède de bons ingrédients. A ses côtés, son mari épousé deux années plus tôt (en septembre 1970), titille déjà le clavier depuis sa plus tendre enfance. Un certain Stevie (Wonder pour les intimes) l'accompagne dans cette difficile entreprise, celle qui, en cette année 1971, la conduit à sortir fort de son coffre un délicieux moment d'émotions. Sur l'album éponyme, le duo Stevie Wonder - Syreeta Wright aligne 7 titres originaux et 2 reprises. L'une de Smokey Robinson, What Love Has Joined Together et l'autre, objet du "délit" qui nous interesse, She's Leaving Home signé des Fab Four. Un titre presque prémonitoire lorsqu'on sait que la flamme entre nos deux protagonistes commencent à s'éteindre (ils divorcent à l'été 1972) lors de l'enregistrement de ce disque. "Quand nous composions cet album, nous connaissions des problèmes dans notre relation. Nous nous sommes mariés très jeune (elle, 24 ans et lui, 20 ans, ndlr) et personne ne nous a donné un mode d'emploi. Pour moi, ce disque représentait l'espoir que, peut-être, nous pourrions sauver notre mariage. Beaucoup de chants expriment cette dimension..." Et notamment donc ce She's Leaving Home d'une beauté exceptionnelle où la voix à la fois forte et fragile de Syreeta donne littéralement la chair de poule. On la voit presque chanter, crier son amour en face de son Pygmalion... et on en oublierait presque ses illustres auteurs. Les claviers "Wondériens" et l'utilisation de la Talkbox (déjà!) enrobent les vocalises de la belle pour un résultat d'une perfection rarement atteinte dans l'art de la reprise. Un modèle du genre qui vient tordre le coup à l'adage selon lequel la copie ne vaut jamais l'original. Sauf peut-être quand le génie passe par là... T.G

Syreeta Wright est décédée en juillet 2004, emportée, à 57 ans, par un cancer du sein.

Extrait de l'album éponyme paru en 1972 chez MoWest (Motown).