Parlez-nous de la rencontre avec Philippe Zdar et de votre duo baptisé Funk Mob...
Nous nous sommes rencontrés dans un studio d’enregistrement. On s’est photocopié le cul ensemble sur la photocopieuse et depuis on ne s’est plus quittés. La Funk Mob est née de notre travail commun avec MC Solaar.
J'étais fan des NWA dont certains membres produisaient des albums sous le nom de Da Lench Mob. Il fallait qu'on fasse pareil. Comme j’étais dans le Funk à l’époque, j’ai remplacé "Lench" par "Funk". Mais j’ai découvert après que George Clinton et toute sa bande de Funkadelic - Parliament s'appelaient The US Funk Mob... 25 ans avant. Du coup, enterrement du nom "La Funk Mob" ce jour-là !
Avec la Funk Mob, on vous a notamment découvert avec des prods pour Solaar, des sorties chez Mo’Wax ou Yellow et des remixes. Pourquoi et quand avez-vous décidez de revêtir le costume de Cassius ?
On aimait bien l'idée d'avoir plusieurs noms différents. A l'époque tout ça ne sortait qu'en vinyles et dans quelques magasins à travers le monde. Beaucoup de gens étaient à l'affût de la nouveauté, comme maintenant d'ailleurs. Mais beaucoup moins de disques sortaient et moins de gens en faisaient. Donc un certain nombre de producteurs avaient deux ou trois noms différents. C'est la culture Techno je crois. Mais c'est rapidement devenu compliqué d'afficher plusieurs pseudos. Cassius, c'était un des 245 labels potentiels de Zdar. Ce nom était trop bien pour un groupe. Un jour, chez Zdar, on faisait de la musique et il passe un disque, le One More Time (1992) de Blake Baxter, je crois. Le sampler était branché vu qu'on bossait, et j'ai commencé à balancer des samples au hasard sur cette musique. Cassius est né a ce moment là je pense, on a commencé en DJ dans son salon avec platines et samplers.
Est-il vrai que, contrairement à Zdar, vous étiez un peu réfractaire à la House et à la Techno ?
Pas réfractaire, quoique... C' est juste qu'à ce moment de ma vie, j’étais obsédé par la Soul, le Funk et le Hip Hop. C'était déjà beaucoup de choses à apprendre, à écouter et à vivre.
Quelle(s) direction(s) vouliez-vous prendre pour ce premier album intitulé 1999 (sorti le 26 janvier... 1999) ?
Je ne suis pas certain qu'on y ait vraiment réfléchi. Ce qui est sûr, c'est qu'on voulait s’éclater ensemble en faisant de la musique. Pour ma part, j'accélérais enfin les tempos. C’était nouveau et jubilatoire.
Le morceau Foxxy est sorti avant sur deux maxis en 1996. Notamment sous le pseudo L’homme qui valait trois milliards utilisé une seule fois. Pourquoi ce choix ?
Foxxy, c’est le premier Cassius, d'ailleurs le label s'appelait aussi Cassius. J'ai toujours été nul pour les noms et L'homme qui valait trois milliards (comme la série TV) me faisait triper quand j’étais puceau. Je sais pas comment Philippe a laissé un nom pareil, sûrement pour me faire plaisir...
Y’avait-il des morceaux prévus pour ce premier album et jamais publiés ?
Je ne me rappelle pas vraiment. Mais on a gardé beaucoup de beats de l'époque qui traînent quelque part.
Où et dans quelles conditions a été composé cet album ?
Nous nous sommes enfermés un mois dans un studio qui s'appelait Musika je crois et qui, après, est devenu le studio de Zdar, Motorbass Studio. On a ramené plein de beats et on faisait chaque tracks en entier l'un après l'autre. Philippe mixait en live des versions de 25 minutes qu'on éditait ensuite.
Comment se répartissaient les tâches dans votre duo à cette époque ? Sur quelles « machines » travailliez-vous ?
Chacun touche à tout à part le mixage que Zdar gère depuis toujours. On avait un Atari 1040, un Akai S3200, un Akai S900, une SP12 et d'autres synthés mais limite pourris. Ce n'était pas si mal...
C’était « l’âge d’Or » de l’utilisation de samples et ce premier album en contient pas mal. Comment avez-vous choisi notamment celui de Cassius 99 (Donna Summer – (If it) Hurts Just a Little...) ? Aviez-vous déceler, en le composant, puis en l’écoutant, le potentiel de ce titre ?
Ce morceau de Donna Summer est produit par Quincy Jones qui est un des musiciens qui m'a donné envie de faire de la musique enfant et qui, ensuite, est devenu un de nos producteurs préférés. Ce passage dans le morceau me rendait dingue quand j'étais môme. J'avais déjà essayé de le sampler durant ma période Hip Hop, mais c'était trop rapide. Là, c’était le tempo parfait.
Quel titre a été le plus difficile à faire et pourquoi ? Celui qui vous a donné et vous donne encore aujourd’hui le plus de satisfaction ?
Sur cet album, tout s'est passé très facilement au studio. Je suis content qu'on ait fait Cassius99. Il nous a permis de faire le tour du monde en business et on s'est bien marrés.
Qui a eu l’idée du visuel de la pochette. Quelle en est votre interprétation ?
La pochette, c’était Alexandre Courtès, Rankin, un photographe Anglais et Zdar. Moi, je sais juste dire si j'aime ou pas. La pochette résume les années pré-selfie, quand c’etait un photographe qui te prenait en photo et pas toi avec ton propre téléphone !
Meilleur souvenir de soirée pour la promotion de l'album 1999 ?
Wow dur... Mais la soirée Respect au Twilo à New York (situé 530 West & 27th street, le club a fermé en 2001, ndlr) avec les Daft, Romanthony et Francois K restera éternellement imprimée. Bon, c'était avant la sortie mais on s'en fout...
16 ans plus tard, et 2 albums au compteur (Au rêve et 15 Again), vous venez de finir le 4e. Comment pourriez-vous le décrire ?
Difficile de le décrire, on est encore dedans. Je peux juste dire qu'on a vécu de sacrés moments de musique et j’espère que cela s'entendra.
Quand sortira-t-il ? Y aura-t-il des invités, des collaborations ?
Je ne sais pas encore quand il va sortir, mais ça va sortir et il y a plein de musique dedans.
Pour finir, quels sont les 3 titres ou artistes que vous écoutez en boucle en ce moment ?
Ella Fitzgerald, Frank Sinatra et João Gilberto. Cela permet de relativiser et d'éviter de sombrer dans l'auto-satisfaction.
Interview T.G
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